L'industrie du cinéma au début de la guerre froide a été marquée par des conflits idéologiques intenses entre les démocraties occidentales et les régimes communistes. La dominance mondiale dHollywood sur la production cinématographique a soulevée certaines préoccupations chez les intellectuels français en raison de limpact que ses films pourraient avoir sur la culture et la langue française. Après laccord Blum-Byrnes signé entre la France et les Etats-Unis, les salles de cinéma françaises ont été envahies par les films américains, la France négociant néanmoins que le doublage soit produit par des français. Cependant, les versions françaises de ces films ont fait lobjet de nombreuses critiques. Certaines versions impliquaient des modifications importantes de lintrigue, et dautres ont introduit des choix de traduction qui montrent une résistance aux récits dominants. Pour illustrer ce phénomène notre analyse se concentrera sur le doublage français des films anti-communistes américains produits entre 1940 et 1970. Par ailleurs, cette étude ne se focalisera pas seulement sur les aspects linguistiques de la traduction, elle examinera avant tout les facteurs externes qui soustendent les processus décisionnels. En effet, en recourant au modèle danalyse des récits de Mona Baker, nous chercherons à comprendre comment les traducteurs, inévitablement influencés par des agents et des facteurs sociopolitiques, ont participé à la transformation des récits conflictuels, et façonné ainsi notre vision de la réalité.